JONAS 1 de 4
INTRODUCTION
Le livre du prophète Jonas
Titre
Suivant la voie tracée par le texte hébreu (texte massorétique), le livre porte en français le nom de son protagoniste, Jonas (littéralement « colombe »), fils d’Amitthaï (#Jon 1:1). La version des Septante (LXX) et la Vulgate lui attribuent le même nom.
Auteur et date
L’auteur du livre n’est pas explicitement mentionné. Le fait que, tout au long du récit, il est fait allusion à Jonas à la troisième personne a poussé certains à attribuer sa rédaction à un autre que le prophète. Cependant, un tel procédé n’est pas rare dans l’A.T. (p. ex. #Ex 11:3 ; #1S 12:11). En outre, les détails biographiques mentionnés au fil du texte indiquent clairement que Jonas en est l’auteur: des événements et expériences aussi étranges ne pouvaient être relatés que par lui. La formulation du verset introductif plaide dans le même sens, puisque Osée, Joël, Michée, Sophonie, Aggée et Zacharie offrent une introduction similaire.
D’après #2R 14:25, Jonas était originaire de Gath-Hépher, près de Nazareth. Il fut le porte-parole de l’Eternel pour les dix tribus du nord juste avant Amos, au cours de la première moitié du VIIIe siècle, vers 760 av. J.-C., durant le règne long et prospère de Jéroboam II (av. J.-C.). Les pharisiens affirmèrent à tort: « De la Galilée il ne sort point de prophète » (#Jn 7:52), puisque Jonas était galiléen. Une tradition juive, invérifiable, fait de lui le fils de la veuve de Sarepta, celui qui fut ressuscité par Elie (#1R 17:8-24).
Contexte et arrière-plan
En tant que prophète des dix tribus du nord d’Israël, Jonas exerça son ministère dans les mêmes conditions qu’Amos. Le royaume connaissait alors une période de prospérité et de paix. La Syrie et l’Assyrie étaient affaiblies, ce qui avait permis à Jéroboam II d’élargir ses frontières, au nord, en récupérant des territoires qui avaient appartenu à David et à Salomon (#2R 14:23-27). C’était, toutefois, une époque de pauvreté spirituelle: la religion était ritualiste, de plus en plus empreinte d’idolâtrie, et la justice corrompue. La richesse et la paix avaient mené le pays à une faillite spirituelle, morale et éthique (cf. #2R 14:24 ; #Am 4:1ss; #Am 5:10-13). C’est pourquoi Dieu avait décidé de punir Israël par l’intermédiaire des Assyriens, qui lui infligeraient destruction et captivité en 722 av. J.-C. La repentance de Ninive fut peut-être favorisée par deux fléaux (en 765 et 759 av. J.-C.) et par une éclipse solaire (en 763 av. J.-C.), phénomènes qui la préparèrent à l’annonce du jugement par Jonas.
Thèmes historiques et théologiques
Même s’il était prophète en Israël, ce n’est pas pour le ministère exercé dans son pays que l’on se souvient de Jonas. Cela pourrait expliquer pourquoi les pharisiens affirmèrent, à l’époque de Jésus, qu’aucun prophète n’était sorti de Galilée (cf. #Jn 7:52). Le livre relate l’appel que Jonas reçut d’aller prêcher la repentance aux habitants de Ninive, ainsi que son refus de s’y conformer. Ninive, capitale de l’Assyrie, était tristement célèbre pour sa cruauté et représentait, dans l’histoire d’Israël et de Juda, un véritable fléau. Le récit est néanmoins centré sur cette capitale païenne fondée par Nimrod, l’arrière-petit-fils de Noé (#Ge 10:6-12), qui fut peut-être la plus grande ville de l’Antiquité (#Jon 1:2 ; #Jon 3:2, #Jon 3:3 ; #Jon 4:11). Elle serait détruite environ 150 ans après la repentance de la génération contemporaine de Jonas (en 612 av. J.-C.), comme prophétisé par Nahum (#Na 1:1ss). Le dégoût qu’il éprouvait d’un point de vue politique, en tant qu’israélite, envers l’Assyrie se combina au sentiment de supériorité spirituelle du peuple élu pour engendrer l’attitude récalcitrante de Jonas face à la mission que Dieu lui confiait. Celle-ci visait en partie à faire honte aux Israélites en leur montrant qu’une ville païenne était capable de se repentir suite à la prédication d’un étranger, alors qu’ils refusaient, eux, de réagir aux injonctions des nombreux prophètes qui leur avaient été envoyés. Le prophète allait découvrir que l’amour et la grâce de l’Eternel s’étendent à toute l’humanité (#Jon 4:2, #Jon 4:10, #Jon 4:11) et ne se limitent pas au peuple élu (cf. #Ge 9:27 ; #Ge 12:3 ; #Lé 19:33, #Lé 19:34 ; #1S 2:10 ; #Esa 2:2 ; #Joe 2:28-32).
Le livre de Jonas révèle l’autorité souveraine de Dieu sur l’homme et sur la création dans sa totalité: tout ce qui a été créé lui doit l’existence (#Jon 1:9) et obéit à chacun de ses ordres (cf. #Jon 1:4 ; #Jon 2:1, #Jon 2:10 ; #Jon 4:6, #Jon 4:7 ; cf. #Mr 4:41). Jésus utilisa l’exemple des Ninivites pour reprocher aux pharisiens leur dureté de cœur et leur refus de se repentir (#Mt 12:38-41 ; #Lu 11:29-32): une population païenne s’était repentie à la prédication d’un prophète pourtant peu enthousiaste; les pharisiens, eux, refusaient de le faire alors qu’ils se trouvaient face au plus grand des prophètes, qui était de toute évidence leur Seigneur et leur Messie. L’attitude de Jonas illustre celle d’Israël qui, choisi et envoyé par Dieu pour être son témoin (#Esa 43:10-12 ; #Esa 44:8), s’est rebellé contre la volonté divine (#Ex 32:1-4 ; #Jug 2:11-19 ; #Ez 6:1-5 ; #Mr 7:6-9). Mais Dieu l’a miraculeusement préservé, pendant des siècles d’exil et de dispersion, pour qu’il proclame finalement la vérité (#Jér 30:11 ; #Jér 31:35-37 ; #Os 3:3-5 ; #Ap 7:1-8 ; #Ap 14:1-3).
Questions d’interprétation
La difficulté essentielle, en matière d’interprétation, est en rapport avec la nature du livre: s’agit-il d’un récit historique ou d’une allégorie/parabole? L’ampleur des miracles, notamment la survie pendant trois jours et trois nuits dans un grand poisson, a poussé des commentateurs sceptiques et critiques à nier la réalité historique du récit pour n’y voir qu’un enseignement spirituel: ses divers éléments constitutifs auraient une simple valeur allégorique, ou le texte dans son ensemble correspondrait à une parabole. Mais aussi étonnants et miraculeux que puissent être les événements relatés, le récit doit être considéré comme historique. En effet, il rapporte sous forme narrative la vie d’un prophète historiquement identifiable de l’A.T., qui a vécu au VIIIe siècle av. J.-C. De plus, dans son enseignement, Jésus-Christ n’a pas présenté l’histoire de Jonas comme une parabole, mais comme un récit réel et historiquement fiable (#Mt 12:38-41 ; #Mt 16:4 ; #Lu 11:29-32).
Plan
I. Fuite loin de la volonté de Dieu (1:1-2:1)
A. Jonas chargé d’une mission (1:1-2)
B. Jonas en fuite (1:3)
C. Jonas poursuivi (1:4-16)
D. Jonas sauvé (2:1)
II. Soumission à la volonté de Dieu (2:2-11)
A. Détresse de Jonas (2:2-4)
B. Prière de Jonas (2:5-8)
C. Repentance de Jonas (2:9-10)
D. Délivrance de Jonas (2:11)
III. Respect de la volonté de Dieu (3:1-10)
A. Rappel de la mission (3:1-2)
B. Obéissance du prophète (3:3-4)
C. Repentance de la ville (3:5-9)
D. Décision de grâce de Dieu (3:10)
IV. Remise en question de la volonté de Dieu (4:1-11)
A. Le prophète irrité (4:1-5)
B. Le prophète blâmé (4:6-11)